Lors du dernier comité central du Parti des peuples africains – Côte d’Ivoire (PPA-CI), Laurent Gbagbo a surpris son auditoire en tempérant les ardeurs militantes. Alors que l’attente était forte quant à l’annonce de mots d’ordre de mobilisation pour contester le pouvoir en place, l’ancien président a opté pour un discours de prudence.
« On prendra les rues, mais ce n’est pas quand ton adversaire t’attend dans les rues que tu vas l’y trouver », a-t-il déclaré, évoquant son expérience de la prison en 1992. Cette référence à son passé carcéral, ainsi que celle de sa famille, s’interprète comme un signe de réticence à prendre des risques susceptibles de le conduire à nouveau derrière les barreaux.
Cette prudence s’explique par plusieurs facteurs. D’une part, la crainte de représailles judiciaires et policières, compte tenu de l’arsenal juridique et sécuritaire déployé par le gouvernement. D’autre part, la volonté de ne pas compromettre les chances de participation du PPA-CI aux prochaines élections.
« On leur laisse le temps de se corriger, d’arranger le pays », a-t-il ajouté, laissant entendre que le PPA-CI privilégie désormais la voie du dialogue et de la négociation. Cette attitude contraste avec les déclarations passées de Laurent Gbagbo, qui avait souvent appelé à la « résistance » et à la « désobéissance civile ». L’ancien président, fort de son expérience, aurait-il pris conscience des limites de la confrontation directe, privilégiant désormais une stratégie plus subtile visant à peser sur le jeu politique par d’autres moyens ?
Quoi qu’il en soit, ce report de l’adoption des mots d’ordre de mobilisation laisse planer le doute sur la capacité du PPA-CI à mobiliser ses troupes et à peser sur l’échiquier politique ivoirien. La question demeure : Laurent Gbagbo a-t-il renoncé à la rue, ou s’agit-il d’un simple calcul tactique ? Seul l’avenir le dira.
Georges Badiel