AFRIKEXPRESS-Face aux interrogations suscitées par l’adoption récente par le Sénat d’une réforme de la loi encadrant la profession pharmaceutique en Côte d’Ivoire, l’Autorité Ivoirienne de Régulation Pharmaceutique (AIRP) est sortie de son silence.
Ce dimanche 8 juin, lors d’une conférence de presse organisée au siège de l’institution, son directeur général, le Dr Assane Coulibaly, a tenu à clarifier les objectifs de cette réforme et à rassurer les professionnels du secteur ainsi que l’opinion publique.
La réforme concerne principalement les articles 13 et 14 de la loi n°533-2015 sur l’exercice de la pharmacie, et vise à lever les freins juridiques à la libre circulation et à l’établissement des pharmaciens dans l’espace UEMOA, conformément aux engagements régionaux pris par la Côte d’Ivoire.
« Cette disposition communautaire date de 2008. Elle avait déjà été partiellement transposée en 2015. Le ministère de la Santé, de l’Hygiène publique et de la Couverture maladie universelle n’a fait que l’actualiser pour l’aligner aux récentes recommandations de l’UEMOA », a expliqué le Dr Coulibaly. Il a rappelé que plusieurs pays membres comme le Sénégal, le Mali, le Bénin ou encore le Burkina Faso ont déjà procédé à cette transposition.
Conscient des craintes exprimées dans le milieu pharmaceutique, le directeur général de l’AIRP a insisté sur le maintien d’un cadre rigoureux : « Les procédures d’attribution de licences resteront strictes. Il ne s’agit nullement d’ouvrir la porte à une concurrence déloyale ou de brader le monopole pharmaceutique. Notre objectif est de préserver la qualité des services et la sécurité sanitaire. »
Au-delà des officines, la réforme ambitionne de dynamiser toute la chaîne de valeur du secteur pharmaceutique : formation, production, distribution, recherche et dispensation. Pour le Dr Coulibaly, cette ouverture constitue une réelle opportunité économique : « L’intégration régionale renforcera le rayonnement du secteur pharmaceutique ivoirien. Toutes les grandes entreprises veulent s’implanter ici. Nous sommes en train de devenir un hub sous-régional. »
Dans le contexte du renforcement de la Couverture Maladie Universelle (CMU), qui prend en charge 70 % des médicaments conventionnés, cette réforme apparaît comme un levier essentiel pour répondre à la forte demande en médicaments. « Il faut voir le développement de la profession pharmaceutique comme une réponse aux besoins sanitaires croissants des populations », a-t-il insisté.
Le directeur de l’AIRP a également annoncé des missions de terrain dans les semaines à venir pour accompagner l’installation de nouvelles officines dans les zones mal desservies, qualifiées de « déserts pharmaceutiques ». « Nous avons un vivier de pharmaciens qualifiés en attente. Il est urgent de les déployer là où les populations ont besoin de soins », a-t-il expliqué.
L’AIRP collaborera étroitement avec les collectivités territoriales pour assurer un maillage équilibré du territoire. « Il ne s’agit pas seulement d’ouvrir des pharmacies, mais de bâtir un véritable service de proximité », a souligné Dr Coulibaly.
En conclusion, le responsable de l’AIRP a réaffirmé l’engagement de son institution à veiller à la protection des intérêts ivoiriens dans le processus d’intégration sous-régionale. Il a également alerté sur la vraie menace pour le secteur : le marché parallèle des médicaments. « Ces circuits illégaux, où circulent des produits falsifiés ou de qualité douteuse, représentent un danger réel pour la santé publique et une concurrence déloyale pour les pharmacies légales. »
Dr Coulibaly a enfin lancé un appel à la population, l’invitant à se procurer les médicaments exclusivement dans les circuits officiels : officines privées et structures de santé publiques. Seuls ces établissements sont habilités à dispenser des médicaments de qualité, dans le respect des normes en vigueur.
Bintou Sanogo