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Maison des Femmes d’Adaké/Dr Denis Mukwege, militant des droits de l’homme : « D’autres Premières Dames d’Afrique doivent s’inspirer de ce projet » (Interview)

Le Dr Denis Mukwege, Prix Nobel de la Paix 2018 et ardent défenseur des droits des femmes, livre son regard sur la Maison des Femmes « Safe Home » d’Adiaké. Convaincu de l’urgence de telles structures pour l’autonomisation féminine, il adresse ses encouragements à Madame Dominique Ouattara et évoque les synergies possibles entre la Fondation Panzi et la Fondation Children Of Africa, insistant sur le potentiel transformateur des femmes africaines.

 

Quel a été votre premier ressenti en découvrant la Maison des Femmes ‘’Safe Home’’ d’Adiaké ?

On a besoin de ce type d’infrastructure pour les femmes qu’on appelle Maison des Femmes. On en a besoin dans toutes les grandes villes. On en a besoin même dans les zones rurales. Je crois qu’on ne peut pas lutter contre des inégalités qui sont dans nos sociétés entre les hommes et les femmes sans pouvoir avoir les moyens pour accueillir les femmes, les soutenir sur le plan psychologique, les réinsérer et leur donner la capacité de prendre leur place dans la société. Je pense qu’un centre comme celui-ci c’est un endroit qui donne tout simplement de l’espoir et j’espère que toutes les femmes qui passeront par ce centre seront très utiles après pour la société ivoirienne.

 

Quels messages souhaitez-vous adresser à Madame Dominique Ouattara, l’initiatrice de ce projet, après cette visite ?

Après cette visite, je voulais tout simplement dire qu’il ne faudrait pas que ce projet soit caché. Il est vrai qu’il faut deux heures de route depuis Abidjan, mais je pense qu’il faudrait que plusieurs autres Premières Dames d’Afrique puissent s’inspirer de ce projet pour le reproduire dans leurs pays qui ont les mêmes problèmes que la Côte d’Ivoire.

 

Quelles types de collaborations envisageriez-vous entre la Fondation Panzi et la Fondation Children Of Africa ?

Je pense que nous pouvons collaborer sur plusieurs plans. Spécialement, je pense que dans la prise en charge des victimes des violences sexuelles, nous avons une expérience de 25 ans. Je pense que par cette expérience nous pouvons avoir une collaboration. Nous sommes déjà dans certains pays africains comme la République Centrafricaine et au Burundi. Nous sommes en train d’initier des activités pareilles en Ethiopie pour les victimes de violence sexuelle de la guerre. Nous avons été également en Guinée-Conakry. Je pense qu’il y a lieu de pouvoir échanger les expériences en Afrique et pour tout simplement pour pouvoir donner à la femme la place qu’elle mérite. Par exemple en Guinée-Conakry, nous avons fait un film documentaire sur les femmes victimes de violence sexuelle.

Je suis impressionné de revoir ces femmes qui mourraient à petit feu, devenir des cheffes d’entreprise qui engagent des hommes. Elles en sont très fières. Tout simplement parce qu’on leur a donné la place qu’elles méritaient dans la société. Je pense que ces expériences peuvent nous permettre tout simplement de pouvoir utiliser comme il le faut, les capacités des femmes africaines. J’ai même écrit un livre sur la force des femmes. J’y crois et je pense que ce continent va être transformé par cette capacité qu’ont les femmes africaines. Leur capacité de voir de façon collective et non de façon individuelle. Leur façon de penser à tout le monde avant de penser à elle-même. Je pense qu’on pourra faire une grande différence si on utilise cette capacité des femmes pour notre continent. On a tout pour vivre heureux dans ce continent, mais il faut utiliser ces femmes qui ont des capacités extraordinaires.

G. Badiel avec Sercom