AFRIKEXPRESS-Le président du Parti Démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI-RDA), Tidjane Thiam, a récemment cédé à la pression exercée par Valérie Yapo, ancienne déléguée du parti à Akoupé. Cette décision survient à un moment crucial, à quelques jours du bureau politique du PDCI, et dévoile une fragilité inquiétante à la tête de la formation politique historique de la Côte d’Ivoire.
Le 26 mars 2025, une annonce officielle a été faite par le porte-parole du PDCI-RDA, Dr Soumaïla Kouassi Bredoumy : Tidjane Thiam, redoutant une déstabilisation interne, a décidé d’annuler toutes les sanctions précédemment imposées aux militants du parti, y compris la suspension de Mme Valérie Yapo, réintégrée ainsi dans ses fonctions. Cette levée des sanctions intervient après plusieurs mois de tensions internes, notamment autour de la contestation de la légitimité de Thiam à la présidence du parti.
Le tournant politique majeur qui vient de se produire au PDCI-RDA ne peut être perçu que sous l’angle de la crainte de Tidjane Thiam de perdre son unique chance de se maintenir à la tête du parti et, par conséquent, d’être le candidat du PDCI à la présidentielle d’octobre 2025. En levant la sanction contre Valérie Yapo, Thiam cherche avant tout à apaiser un environnement interne qui devient de plus en plus hostile. La décision ne résulte pas d’un simple geste de conciliation, mais d’une démarche stratégique, dictée par la peur de voir les dissensions internes s’aggraver, ce qui pourrait compromettre ses chances de conquérir la présidence du pays.
Valérie Yapo, après avoir été exclue du PDCI en octobre 2024 pour avoir contesté la légitimité de Thiam à la tête du parti, n’a jamais cessé de dénoncer l’invalidité de l’élection de ce dernier en raison de son statut de double nationalité au moment de sa prise de fonction. Selon elle, au moment de son élection en décembre 2023, il détenait toujours la nationalité française, ce qui, d’après ses arguments, invaliderait son mandat et les décisions qu’il aurait prises en tant que président du parti. « J’ai eu raison trop tôt d’évoquer la question de la double nationalité de Tidjane Thiam. Voilà pourquoi j’ai été sanctionnée. Mais je fais confiance à la justice ivoirienne et à mes avocats », avait-elle déclaré.
Une accusation lourde de conséquences, qui a rapidement trouvé un écho au sein des militants et des observateurs de la scène politique ivoirienne. Thiam, face à la montée de cette contestation, a pris la décision radicale de rétablir Yapo dans ses droits pour éviter que cette affaire ne devienne un cheval de bataille majeur contre sa propre légitimité, alors que le PDCI-RDA se prépare pour une élection présidentielle cruciale. Thiam a agi par peur de voir son autorité contestée, peur de voir sa candidature de plus en plus remise en cause, peur de perdre ce qui pourrait être sa seule et dernière chance de décrocher le soutien du PDCI.
La levée de la sanction contre Valérie Yapo est une victoire symbolique indéniable pour la militante d’Akoupé. Après avoir contesté la décision du Conseil de Discipline et porté son combat devant les juridictions compétentes, Yapo semble aujourd’hui avoir remporté son bras de fer avec Thiam. Mais cette victoire dépasse le simple cadre de la levée de sanction. Elle est perçue comme un échec retentissant pour la direction du PDCI-RDA, qui a dû céder face à la pression d’une militante locale, illustrant ainsi les fractures internes du parti.
Pour Yapo, la question de la légitimité de Thiam à la tête du PDCI est loin d’être close. Malgré la levée de la sanction, selon certaines sources, elle entend continuer son combat. A en croire certains de ses proches, elle reste déterminée à faire reconnaître que la nationalité française de Thiam au moment de son élection invalide sa présidence et toutes les décisions qu’il a prises depuis. Cette position continue de diviser le PDCI, alors que de nombreux militants se retrouvent pris entre les soutiens à Thiam et ceux qui remettent en question sa légitimité.
Thiam : Une stratégie de survie à court terme
Il y a deux ans, Tidjane Thiam semblait inébranlable, confiant dans sa capacité à diriger le PDCI-RDA et à mener le parti vers un avenir prometteur. Mais la situation a évolué, et la dynamique interne du parti a radicalement changé. Aujourd’hui, Thiam se retrouve dans une position fragile. Ses décisions récentes, notamment la levée des sanctions, révèlent la crainte d’une perte de contrôle total au sein du parti. Ce qui autrefois semblait être une gestion autoritaire s’est transformé en une lutte pour la survie politique à l’intérieur même de sa propre formation.
Conscient que les tensions internes pourraient affaiblir sa position à l’approche des élections présidentielles, Thiam a choisi de faire un geste pour apaiser les militants mécontents et éviter toute nouvelle contestation. L’annulation des sanctions contre Valérie Yapo est un acte de pragmatisme, mais il reflète aussi une certaine faiblesse : Thiam, redoutant de perdre l’unique occasion qui se présente à lui de devenir le candidat du PDCI, semble aujourd’hui prêt à tout pour maintenir son autorité, même si cela signifie céder sur des points qu’il aurait pu considérer comme non négociables.
La décision de Tidjane Thiam de lever la sanction contre Valérie Yapo est une manœuvre dictée par une peur grandissante : celle de perdre le soutien du PDCI et de voir ses ambitions présidentielles anéanties. Si cette démarche a pour but de calmer les esprits au sein du parti, elle met également en lumière la fragilité de son leadership et les tensions internes qui déstabilisent de plus en plus le PDCI-RDA à l’approche des élections de 2025.
L’avenir de Tidjane Thiam au PDCI, et plus largement son ambition présidentielle, dépend désormais de sa capacité à naviguer entre les défis internes et à maintenir une unité de façade qui, en réalité, semble de plus en plus fragile. Le bras de fer entre Thiam et Yapo, loin d’être terminé, pourrait bien être l’un des enjeux majeurs des mois à venir pour le PDCI-RDA et son président.
BINTOU SANOGO